Décret tertiaire : quelles sanctions en cas de non-conformité ?

Le décret tertiaire, pilier de la transition énergétique en France, oblige les acteurs du secteur à réduire leurs consommations énergétiques. Issu de la loi ELAN de 2018, il cible les bâtiments à usage tertiaire excédant 1 000 m². Face à des objectifs ambitieux, la non-conformité à ce décret expose à des sanctions bien précises. Quelles sont-elles ? Cet article décrypte les risques encourus par les entreprises.

Un cadre légal exigeant

Entré en vigueur en octobre 2019, le décret tertiaire impose une baisse progressive des consommations. Les gestionnaires doivent atteindre -40 % d’ici 2030, -50 % d’ici 2040 et -60 % d’ici 2050, par rapport à une année de référence post-2010. Cette trajectoire s’accompagne d’obligations déclaratives : chaque année, les données énergétiques doivent être saisies sur la plateforme OPERAT, gérée par l’Ademe. Un retard ou une omission dans cette démarche constitue déjà une première faute.

L’État ne se contente pas d’objectifs chiffrés. Il exige aussi des actions concrètes : audits, optimisation des équipements, sensibilisation des occupants. Sans ces efforts, le respect des seuils devient illusoire. La réglementation prévoit donc des garde-fous pour garantir l’engagement des responsables.

Les sanctions administratives : une pression immédiate

En cas de manquement, les préfets disposent d’un arsenal de mesures. Si vous omettez de transmettre vos données annuelles sur OPERAT, une mise en demeure vous sera adressée. Ce courrier vous somme de régulariser sous trois mois. Aucun correctif dans ce délai ? Une amende forfaitaire de 1 500 € pour les personnes physiques ou 7 500 € pour les entreprises s’applique alors. Ces montants, bien que modérés, signalent une volonté de rigueur. Le respect des obligations évite ces désagréments.

Plus grave, l’absence de progrès vers les objectifs énergétiques déclenche des sanctions accrues. Le préfet peut exiger un plan d’actions détaillé, assorti de délais stricts. Refuser ou échouer à le suivre expose à des pénalités financières plus lourdes, calculées selon la gravité du retard. L’administration ajuste ces montants au cas par cas, rendant les conséquences difficilement prévisibles mais potentiellement coûteuses.

La « name and shame » : une arme redoutable

Au-delà des amendes, le décret tertiaire mise sur la transparence pour contraindre. Les contrevenants récalcitrants voient leur identité publiée sur un site public. Cette pratique, appelée « name and shame », vise à ternir leur réputation. Pour une entreprise, l’impact peut s’avérer désastreux : perte de confiance des clients, méfiance des partenaires, difficulté à décrocher des marchés. Dans un monde où l’image verte gagne en valeur, ce stigmate pèse lourd. Mieux vaut agir que subir cette exposition.

Toutefois, cette exposition publique n’est pas automatique. Elle intervient après une mise en demeure infructueuse et une évaluation du préfet. Seuls les cas flagrants de négligence y sont soumis. Cependant, son effet dissuasif est indéniable, amplifiant la pression sur les gestionnaires.

Des risques indirects à ne pas négliger

Outre les sanctions officielles, la non-conformité engendre des répercussions collatérales. Un bâtiment énergivore perd en attractivité sur le marché immobilier. Les locataires, sensibles aux coûts d’exploitation, privilégient les sites éco-performants. De même, les investisseurs scrutent désormais les performances environnementales avant de s’engager. Ignorer le décret, c’est donc fragiliser la valeur de son patrimoine.

Les assurances pourraient aussi revoir leurs conditions. Un bien non conforme, plus vulnérable aux normes futures, risque des surprimes ou des clauses restrictives. Ces conséquences, bien que moins visibles, alourdissent le bilan des réfractaires. Anticiper évite donc des coûts inattendus.

Comment éviter les erreurs ?

Anticiper est la clé pour échapper aux sanctions. Commencez par établir votre consommation de référence, base de tout calcul. Un audit énergétique, réalisé par un expert, identifie les leviers d’amélioration : isolation, chauffage, éclairage. Investir dans des technologies sobres limite les efforts futurs. Par ailleurs, une déclaration rigoureuse sur OPERAT vous met à l’abri des premières amendes.

Des dérogations existent pour les cas spécifiques : bâtiments classés, contraintes techniques majeures. Elles nécessitent toutefois des justificatifs solides, examinés avec soin par les autorités.

Une logique d’avenir

Le décret tertiaire ne se résume pas à une contrainte punitive. Il s’inscrit dans une vision globale : décarboner l’économie et préserver les ressources. Les sanctions, loin d’être arbitraires, visent à responsabiliser les acteurs. Elles rappellent que l’inaction coûte plus cher que l’adaptation. Avec des échéances rapprochées, l’urgence est réelle. La non-conformité au décret tertiaire expose donc à des amendes, une humiliation publique et des pertes indirectes. Les préfets disposent d’outils gradués pour sanctionner, tandis que le marché amplifie les risques. Face à cela, l’anticipation et l’investissement s’imposent comme des remparts.

Agir dès maintenant, c’est transformer une obligation en opportunité.