Si vous êtes jardinier par hobby et passionné de nature par cœur, il y a de fortes chances que vous connaissiez déjà le concept des hôtels à insectes (également appelés nichoirs à insectes). Offrant un sanctuaire aux insectes bénéfiques, en particulier aux pollinisateurs, les hôtels à insectes sont considérés comme la solution urbaine au déclin de la population d’insectes bénéfiques dans les environnements humains en raison de la perte d’habitat, de la pollution et de l’abus de pesticides. Les insectes apportent de nombreux avantages à l’écosystème grâce à la pollinisation, au cycle des nutriments et également en tant que source de nourriture pour les oiseaux.
D’innombrables magasins de jardinage et magasins d’ameublement vendent des hôtels à insectes. De nombreux blogs et sites internet proposent des manuels étape par étape sur la façon d’en créer un vous-même. Toutes les unités sont esthétiques, ce qui motive les acheteurs bien intentionnés à adopter le concept. Cependant, ces hôtels à insectes sont souvent mal conçus et offrent un logement inadapté aux insectes cibles. Le signe avant-coureur de ces conceptions est l’utilisation inutile de pommes de pin, de coquilles d’escargots collées, de copeaux de bois et de tubes en plastique transparent. Trop d’hôtels à insectes standard à construire soi-même ne sont pas accompagnés d’un guide clair sur l’entretien, ce qui est très important pour assurer la survie des insectes que vous avez l’intention d’héberger.
Les grands hôtels à insectes (appelés à juste titre condominiums à insectes) utilisant des palettes en bois deviennent très populaires en tant que projets de jardinage individuels ou communautaires, incluant parfois des non-insectes tels que les grenouilles, les crapauds et les hérissons. En revanche, les habitats naturels d’insectes se présentent sous la forme de petits nids séparés, et les grands hôtels d’insectes présentent un risque de maladie et de parasitisme pour les insectes qui vivent en forte densité à l’intérieur. En fait, il a même été observé que le nombre croissant de sites de nidification artificiels mal conçus contribuait à une plus grande perte d’abeilles (solitaires) par parasitisme.
Le parasitisme se produit lorsque les kleptoparasites pondent leurs œufs dans des tubes ou des cellules occupées par des larves d’abeilles. Leurs larves vont éclore, consommer le pollen stocké et tuer les larves d’abeilles à l’intérieur. Les exemples sont les guêpes parasites Melittobia acasta et Coelopencyrtus sp., et la mouche parasite (Cacoxenus indigator) qui attaquent les abeilles osmie rousse (des abeilles solitaires trouvées en Europe). Les hôtels à insectes (surtout les grands) sont très sensible au parasitisme. Lorsqu’ils ne sont pas gérés, les parasites finiront par se propager au reste des hôtels à insectes et continueront pendant les saisons suivantes. Dans le même ordre d’idées, la moisissure apporte des maladies aux insectes. Elle se développe lorsque l’humidité se condense et reste piégée dans les matériaux plastiques utilisés dans les hôtels à insectes sous forme de tubes et de blocs. Le manque de bon toit/abri sur les nichoirs, risquant une exposition constante à la pluie, contribue aussi à la croissance des moisissures.
Bien qu’il semble à première vue que les hôtels à insectes soient plus un inconvénient qu’un sanctuaire pour les habitants, le concept n’est pas une perte de temps. Tout le monde, des détaillants aux jardiniers, est responsable de faire preuve de diligence raisonnable pour s’assurer que ces structures sont conçues et gérées de manière à minimiser les effets négatifs. Les solutions clés sont des conceptions correctes, une maintenance et un environnement nourricier.
Voici la bonne approche des hôtels à insectes :
1. Hôtel à insectes ou refuge à insectes ? Commencez par réfléchir au type d’insecte que vous souhaitez héberger. Par exemple, en France, seulement trois types d’abeilles nichent dans des tubes, à savoir les abeilles osmie rousse (Osmia bicornis), les abeilles mégachilidés (Megachilidae) et les abeilles Chelostoma. Ces abeilles n’occupent que de petits tubes entre 2 mm et 10 mm de diamètre. Pour la majorité des nicheurs terrestres tels que les bourdons, les abeilles des sables, les collétidés et de nombreux types de guêpes bénéfiques, un refuge pour insectes est une approche plus efficace à la place.
2. Être réaliste : plus c’est petit, mieux c’est. Évaluez votre région où vous prévoyez d’installer votre hôtel ou refuge à insectes. Pensez petit et ayez plusieurs unités abritant une espèce plutôt qu’une seule grande qui tente d’héberger un zoo entier, nécessitant des environnements potentiellement conflictuels. Par exemple, l’hébergement de grenouilles et de crapauds nécessite un environnement humide avec une ombre partielle, tandis que les hôtels à abeilles doivent être secs et en plein soleil. Après avoir acquis de l’expérience, vous pouvez construire et créer une unité différente pour une autre espèce.
3. Choisir une conception responsable : il existe un certain nombre de bons guides en ligne rédigés par des entomologistes et des experts en abeilles sauvages. Marc Carlton et Werner David ont beaucoup écrit sur les bonnes conceptions pour les hôtels à abeilles, respectivement en anglais et en allemand. Pour les hôtels sans abeilles adaptés aux coccinelles, aux insectes sans ailes et aux papillons non migrateurs, Melanie von Orlow a écrit des livres et des manuels détaillés, disponibles en français.
4. Construire correctement : l’approvisionnement de vos propres matériaux vous donne la tranquillité d’esprit que votre hôtel à insectes est fait de bois naturel, non traité et sans produits chimiques tels que vernis, peinture et protecteur de bois qui repousseront les insectes. Pour favoriser la durabilité, pensez à utiliser des matériaux recyclés ou naturels de votre jardin. Si les tubes sont percés dans des blocs, les tubes doivent être lisses sans éclats. Les bons hôtels à insectes doivent être construits de manière solide avec un dos et un toit / abri solides pour être protégé de la pluie.
5. Bien l’installer : par exemple, les hôtels à abeilles doivent être positionnés en plein soleil, orientés sud-est ou sud, à au moins un mètre du sol, sans végétation devant obscurcissant les entrées des tunnels. Il doit également être solidement fixé pour éviter les secousses et les balancements dus au vent.
6. Entretenir et nettoyer : c’est la partie la plus négligée d’un hôtel à insectes. Prendre soin d’un hôtel à insectes est tout aussi important que d’en construire un. Par exemple, les hôtels à abeilles doivent être inspectés à la fin de l’été pour enlever et nettoyer les cellules mortes. Cela évitera les moisissures et les acariens qui se multiplieraient sur les abeilles mortes ou les larves. Certains experts recommandent d’amener l’hôtel à insectes occupé dans une zone fraîche et sèche comme un abri de jardin pendant l’hiver pour protéger les habitants hivernants du vent et de la pluie. Sans entretien et nettoyage en temps opportun, un hôtel à insectes autrefois occupé pourrait ne pas plaire la saison prochaine.
7. Remplacer quand il est temps : les hôtels à insectes peuvent se dégrader naturellement après deux ans ou plus car le matériau utilisé n’est pas traité. Changez les blocs ou les pièces de nidification tous les deux ans pour éviter l’accumulation de moisissures, d’acariens et de parasites au fil du temps.
Faire de votre jardin un refuge à insectes :
1. Créer une nature durable : pour encourager les insectes, en particulier les pollinisateurs, faites pousser des plantes bénéfiques qui fournissent du nectar et du pollen. Des espèces indigènes telles que les fleurs de Lysimaque et de Campanule favorisent la biodiversité naturelle et évitent les plantes non indigènes.
2. Un jardin trop entretenu n’est pas un refuge : certains papillons non migrateurs tels que Papilio machaon hivernent sous forme de pupes attachées aux plantes, évitez donc de trop tailler en automne et au printemps. Faites attention aux nids d’abeilles des sables, de bourdons et de guêpes utiles (guêpes germaniques et guêpes communes) avant de tondre ou de pailler votre jardin. Il est plus facile de protéger les nids au sol existants que d’en créer un artificiellement.
3. Limiter ou ne pas utiliser de pesticides : l’utilisation de pesticides (tels que des insecticides, des fongicides et des herbicides) sera contre-efficace car non seulement cela repousse ou tue les insectes bénéfiques qui vivent déjà dans votre jardin, mais cela perturbe également l’équilibre naturel d’un écosystème local. Pratiquez un bon entretien à la main afin que vous n’ayez jamais besoin de recourir aux pesticides en premier lieu. Si tel est le cas, recherchez des solutions respectueuses de l’environnement ou consultez plutôt des professionnels.
Créer un espace pour les insectes peut être une expérience très enrichissante et cela vous apprendra, à vous, à votre famille et à votre communauté, la diversité naturelle et la durabilité. Assurez-vous que votre prochain projet devienne un refuge et non une mode. Vos petits amis et Mère Nature vous en remercieront.
Source : The Entomologist Lodge.